Pour des raisons esthétiques ou thérapeutiques tu as réalisé une opération de réduction mammaire. Tu te demandes si cette opération peut avoir un impact sur un futur allaitement ? Tu trouveras ici des réponses à tes questions ainsi que mon témoignage.

Tout d’abord il faut savoir que pour allaiter correctement, quatre éléments doivent être au rendez-vous :
- une glande mammaire fonctionnelle
- des canaux lactifères complets et dirigeant le lait jusqu’au mamelon
- une sensibilité normale du mamelon
- les fibres nerveuses à l’origine de la sécrétion réflexe de prolactine et d’ocytocine ne doivent pas être sectionnés
Que se passe-t-il lors d’une réduction mammaire ?
Lors d’une réduction mammaire, une partie plus ou moins grande de la glande mammaire peut avoir été enlevée. De même, des canaux lactifères peuvent avoir été sectionnés, ce qui empêche l’écoulement du lait. La sensibilité du mamelon peut diminuer et les fibres nerveuses peuvent avoir été coupées également (empêchant le reflexe d’éjection et la bonne sécrétion hormonale).
Heureusement, le corps humain est doté d’une immense capacité de reconstruction et d’auto-réparation. Mais oui, il faut bien l’avouer, se lancer dans un allaitement après une réduction mammaire, c’est se lancer dans une sacré aventure.
Avec le temps et les grossesses, le corps se prépare à l’allaitement et les canaux se reconstituent, les nerfs se “reconstruisent” en vue d’un futur allaitement. Mais ce n’est pas magique non plus !
L’allaitement est encore plus complexe à lancer lorsque le mamelon a été découpé pendant l’opération et disposé à un nouvel endroit. Théoriquement, la lactation n’est plus possible dans ce cas de figure.
Bref, les chances de réussite d’un allaitement après une réduction mammaire sont faibles (surtout un allaitement exclusif).
En général, après une réduction mammaire, on a du lait (si le mamelon n’a pas été déplacé et que la reconstruction s’est bien opérée) en revanche le souci c’est la quantité de lait ! Les secrétions sont plus faibles qu’un sein non opéré et ne permettent pas, dans la grande partie des cas, de répondre au besoin quotidien d’un bébé. Il faut souvent stimuler la lactation de manière très soutenue. Proposer le sein à de très nombreuses reprises et avoir recours à la stimulation via le tire-lait. Le principal risque étant une faible prise de poids pour le bébé.

Mon témoignage
Ma réduction mammaire remonte à mes 18 ans. A cette époque, la question de l’allaitement s’était brièvement posée lors de l’entretien avec le chirurgien. J’avais alors précisé que je souhaitais allaiter (plus tard dans la vie, mais à 18 ans ce n’était clairement pas la priorité du moment). Il m’avait dit que je pourrai allaiter suite à cette opération. Bien évidemment nous n’étions pas rentré dans les détails de l’allaitement exclusif, mixte, tire-allaitement, complément, lactation, prolactine, ocytocine… A 18 ans, je n’y connaissais absolument rien (et probablement que le chirurgien n’en savait pas beaucoup plus).
Mon premier allaitement, 7 ans après la réduction mammaire
J’ai eu ma première fille à 25 ans, 7 ans après l’opération. Pendant ma grossesse, j’ai eu un réel désir de l’allaiter. On m’avait dit que je pourrai allaiter donc je ne me suis pas plus inquiétée que ça… et j’avais effectivement du lait !
Néanmoins, les difficultés sont arrivées rapidement :
- Une montée de lait tardive (autour de J4) et bébé a perdu 10% de son poids de naissance entre-temps. C’est pas si catastrophique que ça mais ça refroidit.
- Les douleurs à la mise au sein étaient horribles (assez classique) et j’ai été obligée de mettre des bouts de sein. Je pense que ça n’a pas aidé non plus mais je n’aurai pas pu continuer sans. J’ai réussi à les enlever au bout de 3 semaines environ.
- La prise de poids s’est opérée lentement, ma fille n’a récupéré son poids de naissance qu’au 15e jour de vie.
- Nous avons dû commencer les compléments de lait artificiel au 13eme jour de vie pour aider la prise de poids.
- J’ai tiré mon lait rapidement pour stimuler la lactation et nous avons réussi à diminuer les compléments progressivement jusqu’au 1 mois et demi de ma fille. Néanmoins, elle était régulièrement complémentée tout de même (1 ou 2 fois par jour).
- J’ai pris des compléments galactogènes pour aider la lactation.
- A l’approche des 8 semaines de ma fille, nous avons dû augmenter les compléments de lait artificiel car j’ai remarqué que ma lactation baissait beaucoup malgré des stimulations répétées.
- J’ai poursuivi l’allaitement mixte de ses 2 mois jusqu’à ces 3 mois et demi avec principalement des “tétés plaisir”. Elle prenait peu de lait via le sein et se nourrissait principalement avec le lait artificiel. Ma fille grandissait bien, c’était un bébé facile, très peu de pleurs et agréable à vivre !
- A aucun moment je n’ai rencontré de conseillère en lactation et ce fut un regret. Finalement, je ne sais pas si c’est la prise du sein qui avait posé problème, si c’était un souci de positionnement, de freins restrictifs ou bien uniquement la réduction mammaire simplement.. Je ne connaissais pas encore tout ça à l’époque.
Cet allaitement a été difficile à vivre, assez dur à démarrer, rythmé par des doutes, des questions, des peurs. Ce n’était clairement pas l’allaitement de mes rêves et j’ai dû grandement modérer mes attentes.

Deuxième allaitement, 10 ans après la réduction mammaire
Ma deuxième fille est arrivée en 2020, l’année de mes 28 ans. 10 années sont passées après ma réduction mammaire. J’ai de nouveau eu le souhait d’allaiter, ce fut encore plus fort que pour ma première grossesse. J’avais un sentiment d’insatisfaction et je voulais recommencer pour y arriver. J’avais revu mes attentes à la hausse, j’espérai allaiter 6 mois, exclusivement ou alors avec peu de complément. Idéalement, je souhaitais compléter avec du lait tiré. Si j’avais su ce qui m’attendait !
Pour faire court (je raconte mon deuxième allaitement en détail dans cet article) :
- J’ai rencontré le même souci de montée de lait à J4
- Ma fille a perdu 10 % de son poids de naissance dans ses premiers jours de vie (exactement comme sa sœur)
- LA bonne nouvelle : aucune douleur de mon côté, à aucun moment.
- Ma fille a récupéré son poids de naissance à J9, ce qui est mieux que sa sœur, j’étais plutôt satisfaite.
- J’ai pris des compléments galactogènes pour aider la lactation.
- J’ai commencé à tirer mon lait au bout de 2 semaines d’allaitement pour maintenir la lactation car la succion de ma fille n’était pas bonne (freins).
- J’ai pu allaiter exclusivement (car je m’y connaissais davantage sur les positions d’allaitement, la stimulation) pendant 6/7 semaines par la suite ma lactation a grandement baissé. Comme pour ma première fille, c’est au tournant des 6/8 semaines d’allaitement, quand la stimulation de l’allaitement provient du bébé, que ma lactation a baissé drastiquement. Nous avons dû compléter avec du lait artificiel car ma fille s’est mise à perdre du poids.

Avec ce deuxième allaitement: Le niveau de difficulté était (beaucoup) plus élevé et des soucis annexes sont venus se greffer.
- Ma fille a des freins très restrictifs (surtout frein de langue) ce qui n’ a absolument pas aidé pour maintenir une lactation correcte.
- Elle a également un RGO (reflux gastro-œsophagien) interne fort causé par une intolérance au protéines de lait de vache (IPVL), elle pleurait constamment quand elle n’était pas au sein et ne supportait pas la position allongée. Les premières semaines n’ont pas du tout été de tout repos.
- Malgré tous les efforts du monde d’éviction des protéines de lait de vache : ce n’était pas magique et des crises de douleurs persistaient et nous n’étions toujours pas “tranquille”. Nous vivions dans la peur d’une nouvelle crise.
- J’ai poursuivi avec des “tétés plaisir” (allaitement mixte) jusqu’au 2 mois de ma fille avec le peu de lait qui me restait dans la crainte qu’il y ait une micro protéine de lait de vache à l’intérieur. Autrement dit, l’angoisse. Et quand il y avait la moindre trace, on était au courant…
- A partir du moment où nous avons utilisé exclusivement le lait de chèvre, notre fille s’est transformée. Nous avons découvert notre vraie petite fille. Un bébé sourire, calme, sans douleur, apaisé, qui fait des siestes de 3 heures et des nuits de 12 heures. Incroyable.
Bilan : que dire ? Vive le lait de chèvre Capricare !… Non ce n’est pas ça !
Avec la réduction mammaire, il faut modérer ses attentes et savoir se tourner vers de bons professionnels pour réussir à initier un allaitement (exclusif, mixte ou un tire-allaitement). Les difficultés peuvent être nombreuses et ne pas venir seulement de la réduction en elle-même (ce qui rend l’aventure encore plus pimentée). Dans mon cas de figure, quoi que j’ai pu faire, j’ai identifié dans mes deux allaitements une baisse drastique de ma lactation au bout de 6/8 semaines d’allaitement et un réel besoin de compléter.
Ce deuxième allaitement a représenté un réel challenge et les difficultés rencontrées étaient pire que tout ce que j’avais pu imaginer. Avec le recul, je suis fière de ce que j’ai pu accomplir avec les cartes que j’avais en main.

Si tu envisages une chirurgie de réduction mammaire et que tu souhaites allaiter par la suite :
Discute avec ton chirurgien de ce projet d’allaitement.
Envisage une chirurgie la plus conservatrice possible.
Si tu commences un allaitement, que tu as subi une réduction mammaire plus jeune et que tu rencontres les premières difficultés
Rapproche toi rapidement d’une consultante en lactation expérimentée qui saura s’adapter à ta situation et trouver des pistes d’action. Des informations clefs sur la mise au sein, le positionnement, les compléments alimentaires, la physiologie de la lactation peuvent être données et rendre l’allaitement plus “facile”. Et bon courage !
Si tu as connu la même galère, laisse un commentaire 😀 !
Bonjour,
Je m’identifie avec votre témoignage.
Personne ne m’a prévenu que ça pourrait arriver et pourtant tous, généraliste, sage-femme, obstétricien, tous savaient que j’avais du subir une réduction mammaire en 1999. C’est un cauchemar. Aujourd’hui, juste en lui positionnant pour téter il se mettait à pleurer. Mon bébé a refusé le sein toute la journée. J’ai pleuré toute la journnée. Chaque fois qu’il refuse mon sein je sens comme s’il me refusait moi, sa maman et ça me blesse tellement Le personnel médical a apporté le biberon trop tôt, il a pris goût et à cause d’eux je vis un cauchemar depuis le 17 septembre 2022.